jeudi 24 février 2011

Le Ben Laden des décennies 80-90

Aux yeux de tous, Kadhafi est sans conteste un dictateur sanguinaire d'une violence et d'une brutalité sans fin, et l'histoire le classera à n'en pas douter aux côtés des Hitler, des Staline et des Saddam de ce monde. Pourtant, depuis quelques années il était redevenu fréquentable par la communauté internationale. La Lybie est un pays relativement riche, au niveau de ses ressources naturelles on s'entend, avec une production quotidienne de plus de 1.7 millions de barils de pétrole et de gaz par jour. Est-ce pour cette raison qu'on lui a pardonné plus facilement ses petites erreurs de parcours? Simple coïncidence, je suis persuadé que cette réhabilitation fait suite à de multiples actions caritatives et altruistes à travers le monde.

Pour n'en citer que quelques-unes; notons son soutien indéfectible au dictateur fou, violent et sanguinaire qu'était l'Ougandais Amin Dada dans les années 70, aux côtés duquel il a envoyé ses troupes combattre. Il a même eu la bonté de l'accueillir en exil quelques temps à sa chute en 79. Il n'avait fait que 300 000 victimes dans son pays, la plupart innocentes. Le film "Le dernier roi d'Écosse", mettant en vedette l'excellent Forrest Whittaker dans le rôle d'Amin Dada, nous donne d'ailleurs un navrant aperçu de l'atrocité du personnage.

Il a aussi commandité un attentat à la bombe dans une discothèque berlinoise fréquentée par des américains en 1986. Il a commandé personnellement l'attentat contre le vol 103 de la Pan-Am en 1988, faisant 270 victimes à Lockerbie en Écosse. Un autre attentat contre un avion français, le vol 772 d'UTA en 1989 au-dessus du Niger, faisant 170 morts. Il a aussi ordonné l'emprisonnement et la torture de 7 infirmières bulgares de 1999 à 2007, qu'il a d'ailleurs reconnu avoir torturées, par la voie de son fils Al-Islam Kadhafi. En 2009 il a accueilli en héros le terroriste lybien ayant planifié, à sa demande, l'attentat de Lockerbie à sa libération d'une prison écossaise pour raison humanitaire.

Mais voilà, le fond de l'homme est bon, à n'en pas douter. Pour le prouver, il reconnaît en 2003 sa responsabilité dans l'attentat de Lockerbie et accepte même de verser 2.16 milliards de dommages aux familles des victimes, ce qui a pour conséquence la levée définitive des sanctions internationales qui pesaient contre lui.

Aujourd'hui je demande des réponses. Non pas des américains, bien qu'ils nous doivent eux aussi des explications sur les différences de politique entre Kadhafi et Saddam Hussein, mais bien de SNC-Lavallin. Comment se fait-il que cette firme, fleuron de l'ingénierie québécoise, dans laquelle la Caisse de dépôt et de placement détient des actions (ce qui me donne le droit de questionner), accepte un contrat de 450 millions en Lybie? Ils nous diront sûrement que si ce n'était pas nous c'eut été quelqu'un d'autre. Mais je m'en fous. Faire des affaires avec un état voyou c'est jouer le jeu de ces criminels et contribuer à les maintenir au pouvoir. Il est grand temps que nos gouvernements et nos entreprises adoptent des règles éthiques strictes et respectueuses des peuples et exigent de nos partenaires commerciaux quels qu'ils soient le respect de la déclaration universelle des droits de l'homme, adoptée il y a plus de soixante ans, soit en 1947. Bien sûr la Chine et l'Inde ne répondent pas encore à ces critères mais il n'en tient qu'à nous, partenaires occidentaux, de les y enjoindre et de les guider à terme sur cette voie.

Kadhafi est le Ben Laden des années 80-90. Il a appuyé et commandité les pires attentats au nom de son peuple. Et aujourd'hui qui s'occupe de le renverser et de le juger? Les américains comme ils l'ont faits avec Hirohito, Hitler, Saddam ou Noriega? Non, son propre peuple, qui contrairement à nous, a de quoi être fier.


mardi 22 février 2011

Leçons de démocratie arabe et africaine

Ma première leçon de démocratie remonte à novembre 1989 avec la chute du mur de Berlin. L'image de milliers d'allemands de l'est en liesse devant une démocratie et une liberté enfin retrouvée restera à jamais gravée en moi. Pour la première fois je prenais conscience de ces valeurs que nous, nord-américains, prenons pour acquises. Aujourd'hui ce sont les tunisiens, les égyptiens, les lybiens, les iraniens, les yéménites et j'en passe, qui nous donnent une grande leçon de liberté et de démocratie. Tous les jours ils sont des milliers à risquer leur vie pour cette noble cause. Non pas que nous devrions descendre dans la rue pour exiger un renversement de pouvoir dans la révolte, mais à tout le moins nous devrions sincèrement nous interroger sur l'importance que nous accordons à ces valeurs. Les méritons-nous vraiment?

Aux dernières élections provinciales en 2008, le taux de participation n'a été que de 57,33%. Ce n'était guère mieux sur la scène fédérale avec un faible 58,8% et le pire revenant aux municipales avec une honteuse moyenne de 40% au niveau provincial. Chez nous il est rare de voir des gens fiers et heureux exprimer leur droit de vote. Les rares dont je me souvienne sont des immigrants ayant fuient une dictature à la Duvalier ou à la Pinochet et qui non seulement se faisaient un devoir d'exercer leur droit de vote mais se réjouissaient de pouvoir exprimer leurs opinions politiques. Mise à part, c'est quasiment résigné que nous, les souches, allons voter et si par malheur le temps d'attente dépasse dix minutes plusieurs rebroussent chemin, ayant mille occupations plus importantes que de voter. C'est triste à pleurer.

Regardez les informations internationales à l'occasion et remarquez les files d'attente lors d'élections en Afrique ou en Haïti. On y voit souvent des milliers de citoyens faire la file pendant des heures sous un soleil de plomb, malgré la soif, la faim, les mouches, les bébés qui pleurent, la possibilité d'un scrutin annulé, les fraudes massives et j'en passe. Songez un seul instant à ce que serait notre taux de participation si il fallait que nous ayons à endurer ne serait-ce que le quart de ces contraintes. Il chuterait en deçà de 5% j'en suis convaincu.

Il est facile de chialer sur nos dirigeants actuels, et j'en suis parfois. Ce qui nous donne ce privilège est, à mon humble avis, leur légitimité. Mais on doit reconnaître qu'ils en ont de moins en moins d'une élection à l'autre et de ce fait il n'est pas loin le jour où nous serons peu à avoir la légitimité de nous prononcer puisque nous l'acquérons, je pense, qu'en allant voter. Posons-nous donc la question aujourd'hui à savoir si nous méritons toutes ces libertés et cette démocratie. Plusieurs prétendent, en tentant de s'en convaincre pour ne pas admettre leur lâcheté, que ce sont tous des pourris et que c'est pour cette raison qu'ils ne vont plus voter. Je leur répondrai, présente-toi, annule ton vote ou ferme-la.